Alimentation et polyarthrite rhumatoïde

Kathryn Adel, M.Sc, Dt.P, CSSD
Nutritionniste chez SOSCuisine.com, spécialisée en nutrition sportive et gastro-intestinale

3 mars 2022

La polyarthrite rhumatoïde (PR) est une maladie systémique auto-immune caractérisée par une inflammation et une atteinte aux articulations, avec une destruction progressive du cartilage et des os. Des facteurs génétiques et environnementaux déterminent la susceptibilité à développer cette condition. Dans les dernières années, un nombre croissant d’études ont démontré que l’alimentation joue un rôle central dans le risque et la progression de la maladie. Bien qu’il n’existe pas vraiment de consensus à propos de l’alimentation à adopter en cas de PR, plusieurs nutriments présentent des propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes, avec un rôle protecteur pour le développement de la PR, tandis que d’autres peuvent contribuer à augmenter l’inflammation. L’altération du microbiote intestinal de même que des modifications de la composition corporelle ont aussi un rôle à jouer sur l’apparition et la progression de la PR.

Microbiote et polyarthrite rhumatoïde

Une altération du microbiote intestinal pourrait être liée à la pathogenèse de plusieurs maladies inflammatoires, dont la PR. Les études indiquent que les patients atteints de PR présentent des différences significatives dans la composition de leur microbiote intestinal par rapport aux témoins1. Une alimentation qui inclut un apport élevé et varié en fibres alimentaires permet d’améliorer la composition du microbiote intestinal. Les fibres sont dégradées par les bactéries intestinales Firmicutes et Bactéroides en acide gras à chaînes courtes tels que le butyrate, qui à son tour aide à réduire l’inflammation. Une alimentation de type méditéranéenne, de même qu’une alimentation végétarienne, qui incluent une variété d’aliments riches en fibres, peuvent être bénéfiques pour la PR en améliorant la composition du microbiote intestinal. Différentes études ont rapporté qu’une adhésion au régime méditerranéen est associée à un microbiote plus diversifié et à des niveaux plus élevés d’acide gras à chaîne courte fécaux1.

Aliments à inclure en cas de polyarthrite rhumatoide

De façon générale, les études montrent un effet protecteur de divers aliments incluant la consommation de fruits, légumes, thé vert, vin rouge (en modération) et aliments fermentés2.

Les oméga-3 peuvent aussi jouer un rôle bénéfique. La plupart des études cliniques effectuées rapportent un effet anti-inflammatoire de la prise d’un supplément d’oméga-3 pour la PR, mais les effets des oméga-3 dérivés de l’alimentation ont été moins évalués2. Selon une méta-analyse, une dose de plus de 2,7 mg d’oméga-3 par jour (via un supplément) peut aider à réduire l’inflammation, la douleur et le besoin de médicaments anti-inflammatoires et analgésiques chez les personnes atteintes de PR3.

Plusieurs données ont montré qu’une carence en vitamine D est associée à la progression de la PR2. Ainsi, il peut être utile de consulter son médecin pour faire évaluer son taux de vitamine D et le supplémenter au besoin.

La diète méditerranéenne peut être bénéfique pour la PR en modulant favorablement le microbiote intestinal et la fonction de barrière intestinale et en réduisant l’inflammation1,2,4. Des études sur le régime méditerranéen ont montré des effets bénéfiques chez les personnes atteintes de PR, notamment des améliorations de l’évaluation globale du patient, du score de douleur, de la raideur matinale, de la fonction physique et de la mesure de la protéine C-réactive (CRP), qui est un indicateur de l’inflammation4.

Les études suggèrent qu’un alimentation végétarienne ou végétalienne, fournissant une grande quantité d’antioxydants et de fibres, peut aussi être bénéfique pour la PR en améliorant la composition du microbiote et en diminuant l’inflammation1,2,4. Dans une étude clinique incluant 24 patients atteints de PR modérée à sévère, un régime végétalien très faible en gras suivi pendant quatre semaines s’est accompagné d’une réduction significative du poids corporel et des symptômes de la PR5.

Des études portant sur différents types de jeûnes chez des patients atteints de PR ont suggéré des améliorations dans l’évaluation globale des patients, la raideur matinale et la douleur4. Différents types de jeûnes ont été associés à différents résultats4.

Aliments à limiter en cas de polyarthrite rhumatoïde

La composition corporelle peut influencer le risque de développement de PR. En particulier, l’obésité de même que l’augmentation de l’indice de masse corporelle (IMC) et du tour de taille sont des facteurs de risque de la PR2. Ainsi, une alimentation saine qui limite les produits transformés est à favoriser pour favoriser une saine gestion du poids corporel.

Une consommation élevée en boissons sucrées, de même qu’une consommation de plus de quatre tasses de café par jour, ont été associés au développement de la PR2.

Une consommation excessive de viande rouge est associée à un risque accru de PR2. Les explications possibles de cette association résident entre autres dans l’augmentation de l’inflammation en lien avec les gras saturés et les nitrites contenus dans la viande rouge. Un apport élevé en sodium est aussi associé à un risque accru de PR2.

À ce jour, les données sur les produits laitiers sont controversées, des études ayant rapporté des associations positives, inverses ou aucune association entre la consommation de produits laitiers et le développement de la PR2. Il a été émis l’hypothèse que la consommation de produits laitiers pourrait être associée au développement de la PR en déclenchant une réaction inflammatoire, bien que seule une petite proportion de patients atteints de PR examinés pour la sensibilité des muqueuses aient présenté des signes de réactivité aux protéines du lait2. Une autre hypothèse est que la viande rouge, les œufs et les produits laitiers sont les principales sources de triméthylamine-N-oxyde (TMAO), un métabolite pro-inflammatoire issu du métabolisme de la choline et de la carnitine2. D’autre part, un effet protecteur du lait pourrait être lié à sa teneur en vitamine D2.

Que penser des diètes d’élimination comme le régime Seignalet?

Le régime du docteur Seignalet implique de supprimer les produits laitiers, le gluten, le maïs, ainsi que les viandes cuites à une température supérieure à 110°C dans le but de réduire l’inflammation. Bien qu’il ne soit pas appuyé par des données probantes, de nombreux témoignages rapportent ses effets positifs sur l’inflammation et la douleur. Notre menu «Inflammation chronique»  est conçu pour les personnes qui désirent essayer ce régime.

Les études suggèrent que les effets positifs observés avec les régimes d’élimination pourraient être associés à une diminution de la réponse inflammatoire associée à la consommation de certains aliments4. Les études impliquant diverses restrictions alimentaires ont suggéré que les réponses sont très individualisées et dépendent principalement des intolérances/allergies alimentaires de chacun4. Il convient de noter que les restrictions alimentaires peuvent aussi évoquer un effet placebo entraînant une amélioration du bien-être4.

Faut-il éliminer les solanacées («nightshade» en anglais)?

L’un des mythes au sujet de la PR consiste à éviter les aliments de la famille des solanacées, dont font partie les tomates, les pommes de terre blanches, les aubergines, les poivrons et les baies de goji. La croyance est que l’inflammation serait causée par une accumulation de solanine, un composé chimique trouvé dans ces plantes. Cependant, cette croyance n’est pas supportée par des données probantes, et il est peu probable qu’éviter les traces de solanine présentes dans ces aliments réduise la douleur ou inflammation arthritique. Au contraire, les solanacées sont riches en fibres et en nutriments protecteurs pour la PR.

En conclusion

En conclusion, la pratique régulière d’activités physiques, une saine gestion du poids corporel et des habitudes alimentaires saines incluant une variété d’aliments à base végétale non transformés et des oméga-3 sont à privilégier pour réduire l’inflammation et les symptômes chez les personnes atteintes de PR.  Les menus  « Maigrir méditerranéen » et « Végétarien » de SOSCuisine.com, basés sur la diète méditerranéenne et personnalisables selon les allergies, intolérances et préférences de chacun, sont une façon simple et efficace de suivre une alimentation équilibrée riche en aliments à base végétale.


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Références

1. Durado et coll. (2020) Diet as a Modulator of Intestinal Microbiota in Rheumatoid Arthritis. Nutrients;12(11):3504.
2. Gioia et coll. (2020) Dietary Habits and Nutrition in Rheumatoid Arthritis: Can Diet Influence Disease Development and Clinical Manifestations? Nutrients;12(5):1456.
3. Lee, Bae et Song (2012) Omega-3 polyunsaturated fatty acids and the treatment of rheumatoid arthritis: a meta-analysis. Arch Med Res;43:356–362.
4. Philipou et coll. (2021) Rheumatoid arthritis and dietary interventions: systematic review of clinical trials. Nutr Rev; 79(4):410-428.
5. McDougall et coll. (2002) Effects of a very low-fat, vegan diet in subjects with rheumatoid arthritis. J. Altern. Complement; 8, 71–75.
6. Raad et coll. (2021) Dietary Interventions with or without Omega-3 Supplementation for the Management of Rheumatoid Arthritis: A Systematic Review. Nutrients; 13(10): 35065.

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