Quoi manger quand on a une maladie inflammatoire de l’intestin?

Kathryn Adel, M.Sc, Dt.P, CSSD
Nutritionniste chez SOSCuisine.com, spécialisée en nutrition sportive et gastro-intestinale

2 septembre 2021

Les maladies inflammatoires de l’intestin (MII) incluent un groupe de conditions dont les deux formes principales sont la colite ulcéreuse et la maladie de Crohn. Ces maladies provoquent une inflammation de la muqueuse du tube digestif et perturbent la capacité du corps à digérer et absorber les nutriments. Les personnes atteintes peuvent éprouver des périodes aiguës de symptômes (période active) et d’autres moments où leurs symptômes sont absents (période de rémission). Les signes et symptômes peuvent inclure des douleurs abdominales, de la diarrhée, du sang dans les selles, une diminution de l’appétit et une perte de poids. La cause exacte de ces maladies demeure inconnue et, par conséquent, il n’existe aucun remède.

Pourquoi modifier son alimentation?

Des modifications des habitudes alimentaires peuvent potentiellement permettre aux personnes atteintes de MII de :

  • Réduire l’inflammation et atteindre la rémission
  • Réduire la médication
  • Réduire les rechutes
  • Réduire les symptômes digestifs
  • Éviter les carences nutritionnelles
  • Prévenir le risque de cancer
  • Optimiser la qualité de vie

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Conseils Généraux

Voici quelques conseils généraux pour les MII :

  • Favoriser une bonne hydratation en tout temps
  • Pratiquer une activité de relaxation pour favoriser une meilleure gestion du stress
  • Dormir au moins 7 heures par nuit
  • Manger lentement, en position bien assise en prenant soin de bien mastiquer.
  • Manger de plus petites portions plus souvent. De cette façon, l’absorption des nutriments est augmentée et les besoins nutritionnels ont plus de chances d’être comblés, même si on a un appétit réduit.
  • Éviter les édulcorants (aspartame, sucralose, xylitol, stevia, etc.) que l’on retrouve entre autres dans les boissons, gommes à mâcher et aliments ‘diète’ ou sans sucre
  • Éviter les aliments transformés, incluant ceux qui contiennent les additifs suivants: carraghénane, émulsifiants, dioxyde de titane, maltodextrine.
  • Cuisiner davantage avec des aliments frais et entiers, non transformés
  • Limiter les sucres ajoutés à moins de 25 grammes par jour
  • Limiter les viandes rouges, les viandes transformées et les aliments riches en gras saturés ou trans, incluant les fritures, les desserts et friandises sucrées commerciales, les produits laitiers riches en gras, l’huile de palme et l’huile de coco
  • Remplir un journal alimentaire avec les symptômes afin d’identifier les aliments problématiques et éviter d’éliminer une trop grande quantité d’aliments, le but étant de maintenir une alimentation variée et équilibrée.

Carences alimentaires et suppléments

Les carences en vitamines et minéraux, notamment en fer, calcium et vitamine D, sont fréquentes chez les personnes atteintes de MII, les mettant à risque d’anémie et de perte de densité osseuse. En période active de maladie, l’absorption des vitamines et minéraux peut être diminuée, ce qui augmente le risque de développer des carences. Il est recommandé de prendre un supplément de vitamine D pendant les mois d’octobre à avril, et à l’année pour les personnes de 50 ans et plus. Il est important d’avoir un apport optimal en acides gras oméga-3 pour aider à réduire l’inflammation. Il est recommandé de consommer du poisson au moins trois fois par semaine. Les personnes végétariennes ou qui ne consomment pas de poisson peuvent prendre un supplément d’oméga-3. Il est important de consulter un médecin pour faire un bilan sanguin afin de déterminer quels suppléments alimentaires sont appropriés. On ne devrait jamais prendre de suppléments sans obtenir l’avis préalable d’un professionnel de la santé.

Les fibres alimentaires

Souvent, les personnes atteintes de MII ont tendance à limiter les fibres alimentaires par peur d’avoir des symptômes digestifs. Or, les fibres sont bénéfiques pour la santé intestinale. Il est recommandé de consommer des aliments riches en fibres solubles et en prébiotiques pour réduire les symptômes de diarrhée et l’inflammation dans le côlon et ainsi optimiser la santé du microbiote intestinal. Une étude récente a démontré qu’une alimentation riche en fibres et faible en gras peut réduire l’inflammation et la dysbiose intestinale et améliorer la qualité de vie des patients atteints de colite ulcéreuse1.

Les personnes qui sont en période active de la maladie ou qui ont une sténose, c’est-à-dire une diminution de la largeur l’intestin qui peut causer des blocages, devraient suivre une diète faible en résidus. Cependant, la texture des fibres peut être adaptée pour optimiser la tolérance et éviter les complications, par exemple sous forme de purées, potages et smoothies.

Quoi manger en période active de la maladie

En période active de la maladie, il est recommandé de consommer une diète riche en calories et protéines et faible en fibres et résidus. Les aliments devraient être répartis en cinq ou six petits repas par jour, et on peut consommer des smoothies au besoin. On devrait éviter de sauter des repas, ce qui peut rendre l’intestin grêle plus actif et augmenter les gaz et les selles liquides.

Il est possible de développer une intolérance temporaire au lactose. Dans ce cas, on peut choisir des produits laitiers faibles en lactose. Il est aussi recommandé d’éviter les aliments très gras, les aliments épicés, les aliments riches en sucre, le café et l’alcool, qui peuvent potentiellement être plus difficiles à tolérer.

En période active de la maladie, il peut être plus difficile de tolérer les aliments riches en résidus tels que les fruits et les légumes crus, les laitues, les pelures de fruits et légumes, les noix et graines, ainsi que le popcorn. Dans ce cas, on peut privilégier les aliments riches en fibres qui ont une texture plus molle ou liquide tels que les smoothies, les potages, les légumes cuits et pelés, les purées de fruits et de légumes et les beurres de noix crémeux. Une fois les symptômes disparus ou grandement diminués, on peut tenter d’augmenter progressivement son apport en fibres et la variété de son alimentation afin d’optimiser sa santé. Il est conseillé de réintroduire un seul aliment à la fois en petite quantité, de surveiller ses symptômes à l’aide d’un journal alimentaire, et d’arrêter de manger les nouveaux aliments si on développe des douleurs abdominales ou de la diarrhée.

La diète faible en FODMAP

Les FODMAP sont des glucides fermentescibles qui ne sont pas bien digérés par le système digestif et qui se retrouvent alors en quantité importante dans le gros intestin (côlon) où ils sont fermentés. Cette fermentation peut entraîner, chez les personnes qui y sont sensibles, des symptômes digestifs. Cette diète est efficace pour réduire les symptômes digestifs des personnes souffrant du syndrome du côlon irritable (SII). Des études suggèrent qu’une diète faible en FODMAP peut aussi aider à réduire les symptômes gastro-intestinaux chez les personnes atteintes de MII2. L’alimentation faible en FODMAP est conçue pour être suivie à court terme. Il est important de réintroduire les aliments par la suite en suivant un protocole bien précis afin d’identifier la ou les familles problématiques. Ce protocole de plusieurs semaines peut être suivi avec l’aide d’une nutritionniste formée spécifiquement à cet effet, ou de façon autonome avec les ressources offertes sur le site SOSCuisine.com, dont les menus faibles en FODMAP personnalisés.

La diète méditerranéenne

La diète méditerranéenne est reconnue depuis longtemps pour ses effets protecteurs contre diverses maladies chroniques. Elle se caractérise par un apport élevé en aliments d’origine végétale, une consommation régulière de poisson et de volaille, une consommation modérée de vin rouge, de produits laitiers et d’œufs et une faible consommation d’aliments transformés, sucreries, de viande rouge et de charcuteries.

Plusieurs études démontrent que la diète méditerranéenne peut être efficace pour réduire l’inflammation, améliorer le microbiote intestinal et favoriser la rémission des symptômes chez les personnes atteintes de MII3,4, 5.

Les menus Maladie de Crohn et colite ulcéreuse de SOSCuisine sont basés sur la diète méditerranéenne et conçus spécifiquement pour les personnes souffrant de MII.

Le régime en glucides spécifiques (SCD – Specific Carbohydrate Diet)

Le régime en glucides spécifiques (SCD – Specific Carbohydrate Diet en anglais) a été développé par Dr Sidney Hass en 1930 pour les enfants atteints de la maladie coeliaque. Il a été popularisé plus tard par Élaine Gottschall via le livre Breaking the vicious cycle. Cette diète élimine les produits céréaliers, les légumes féculents (patates, patates douces, maïs, navet, certaines légumineuses), les produits laitiers (à l’exception du yogourt fermenté), les sucres ajoutés (sauf le miel), le soya, les aliments transformés, les additifs et les émulsifiants, incluant les fruits, légumes et poissons en conserve. Seuls les monosaccharides qui requièrent un niveau de digestion minimal sont permis. Ainsi, les aliments permis sont principalement les fruits et légumes frais (sauf les légumes féculents), la viande, la volaille, le poisson, les fruits de mer, les oeufs, les noix, les graines (sauf les graines de lin, chia et de chanvre), les arachides, les huiles, certaines légumineuses et le yogourt fermenté fait maison. Il existe aussi une diète SCD modifiée, qui permet d’ajouter le riz, l’avoine, le sirop d’érable, les patates douces et le cacao non-sucré.

Selon plusieurs études cliniques, la diète SCD peut permettre aux personnes atteintes de MII d’atteindre la rémission6, ,7, 8, 9. Une nouvelle étude a comparé l’efficacité de la diète SCD à la diète méditerranéenne chez 194 patients adultes atteints de la maladie de Crohn et présentant des symptômes légers à modérés10. Ceux-ci ont été répartis au hasard pour consommer la diète méditerranéenne ou la diète SCD pendant 12 semaines. Il n’y a eu aucune différence significative entre les deux régimes en termes d’amélioration des symptômes et de réduction des marqueurs inflammatoires. Cette étude indique que les deux régimes peuvent être aussi efficaces pour favoriser la rémission des symptômes chez les adultes atteints de la maladie de Crohn. L’alimentation méditerranéenne a l’avantage d’être moins restrictive, plus variée et facile à suivre à long terme comparativement à la diète SCD. Elle semble donc être un choix à privilégier pour la plupart des patients atteints de MII.

En conclusion

Les menus pour la Maladie de Crohn et colite ulcéreuse de SOSCuisine.com, personnalisables selon les allergies, intolérances et préférences de chacun, sont une façon simple et efficace d’appliquer au quotidien les recommandations de cet article. En alternative, une consultation avec nutritionniste spécialisée en santé gastro-intestinale permettra d’accompagner vos patients vers l’approche qui correspondra le mieux à leurs besoins.


SOSCuisine.com est une plateforme de thérapie nutritionnelle, qui offre une large gamme de menus spécialisés, conçus par nutritionnistes, pour une trentaine de conditions médicales et autres besoins. Le service est recommandé par plusieurs organismes du secteur de la santé, dont le CHUM et le Centre EPIC de l’Institut de cardiologie de Montréal.
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Références

1 Fritsch et coll. (2000) Low-Fat, High-Fiber Diet Reduces Markers of Inflammation and Dysbiosis and Improves Quality of Life in Patients With Ulcerative Colitis. Clin Gastroenterol Hepatol; S1542-3565(20)30685-6.
2 Gearry et coll. (2009) Reduction of dietary poorly absorbed short-chain carbohydrates (FODMAPs) improves abdominal symptoms in patients with inflammatory bowel disease-a pilot study. Crohns Colitis;3(1):8-14.
3 Godny (2020) Adherence to the Mediterranean diet is associated with decreased fecal calprotectin in patients with ulcerative colitis after pouch surgery. Eur J Nutr;59(7):3183-3190.
4 Gosh et coll. (2020) Mediterranean diet intervention alters the gut microbiome in older people reducing frailty and improving health status: the NU-AGE 1-year dietary intervention across five European countries. Gut;69(7):1218-1228.
5 Chicco et coll. (2021) Multidimensional Impact of Mediterranean Diet on IBD Patients. Inflamm Bowel Dis;27(1):1-9.
6 Suskind et coll. (2020) The Specific Carbohydrate Diet and Diet Modification as Induction Therapy for Pediatric Crohn’s Disease: A Randomized Diet Controlled Trial. Nutrients;12(12):3749.
7 Suskind et coll. (2016) Patients Perceive Clinical Benefit with the Specific Carbohydrate Diet for Inflammatory Bowel Disease. Dig Dis Sci;61(11):3255-3260.
8 Kakodkar et Mutlu (2017) Diet as a Therapeutic Option for Adult Inflammatory Bowel Disease. Gastroenterol Clin North Am; 46(4):745-767.
9 Cohen et coll. (2014). Clinical and mucosal improvement with specific carbohydrate diet in pediatric Crohn disease. J Pediatr Gastroenterol Nutr; 59(4):516-21.
10 Cohen et coll. (2014). Clinical and mucosal improvement with specific carbohydrate diet in pediatric Crohn disease. J Pediatr Gastroenterol Nutr; 59(4):516-21.
11 Cohen et coll. (2014). Clinical and mucosal improvement with specific carbohydrate diet in pediatric Crohn disease. J Pediatr Gastroenterol Nutr; 59(4):516-21.
12 Cohen et coll. (2014). Clinical and mucosal improvement with specific carbohydrate diet in pediatric Crohn disease. J Pediatr Gastroenterol Nutr; 59(4):516-21.


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