L’art-thérapie est une notion qui reste floue pour plusieurs d’entre nous. Souvent associée aux dessins d’enfants victimes de traumatismes, cette approche thérapeutique non verbale va pourtant bien au-delà. Offerte sous forme individuelle, familiale ou en groupe, l’art-thérapie permet de dénouer la souffrance, sans qu’il soit pour autant nécessaire d’être un artiste accompli ! Médecins francophones du Canada, quant à elle, s’associe au Musée des beaux-arts de Montréal pour offrir des prescriptions muséales, une initiative visionnaire. Deuxième article d’une série de trois.
Le soutien généreux d’un mécène passionné
Lorsqu’un conteur de la trempe de Michel de la Chenelière vous raconte son histoire, le temps s’arrête. Quittant sa France natale avec son unique sac à dos, rêvant de l’Amérique, le jeune homme d’alors a suscité le scandale dans sa famille. « J’étais un décrocheur, j’avais raté mon bac parce que j’avais injurié le professeur de mathématiques », raconte le principal intéressé. « Puis, en 1969, alors que les Américains atterrissaient sur la lune, moi j’ai atterri au Québec ! » C’était il y a cinquante ans.
Aujourd’hui, l’homme d’affaires, qui a fait fortune dans l’édition, est un mécène fidèle du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). À l’époque, pourtant, Michel de la Chenelière était loin de se douter où le mènerait son chemin. Il survit d’abord de petits boulots, et au fil des hasards, devient éditeur en chef d’une maison d’édition de Toronto… pour des manuels de mathématiques, amusant clin d’œil du destin. Quelques détours plus tard, fort de son expérience dans le milieu, sans le sou, mais ayant trouvé une niche à exploiter, il lance sa propre maison d’édition qui publie des ouvrages pédagogiques francophones à travers le Canada, destinés aux programmes d’immersion, de la maternelle à l’université. En 2006, il vend les Chenelière Éducation à TC Transcontinental et s’assure d’un avenir confortable, se consacrant désormais à la philanthropie.
L’ardent défenseur de l’éducation est devenu en 2019 le 33e président du conseil d’administration du MBAM. Grâce à deux dons d’importance, ce mécène a permis au Musée de doubler les espaces consacrés à l’éducation en 2012 avec la création du Studio Michel de la Chenelière, puis, à les tripler en 2016 avec l’Atelier international d’éducation et d’art-thérapie Michel de la Chenelière. Cet espace est une inspiration partout à travers le monde. Il accueille 300 000 participants chaque année, un record au Canada pour ce type d’institution.
Les bénéfices de l’art et du beau
L’art-thérapie trouve sa genèse au début du XXe siècle, dans une forme de psychothérapie basée sur la création artistique où, peu importe le résultat esthétique, la voie de l’art permet d’explorer et d’exprimer les méandres sombres de sa vie intérieure. Aujourd’hui, l’art-thérapie continue de soulager la souffrance et l’on sait, des études l’ont démontré, que côtoyer le beau favorise la sécrétion des hormones du bien-être.
À l’heure actuelle, en collaboration avec divers professionnels de la santé et chercheurs du milieu universitaire, le MBAM a supervisé plus d’une dizaine d’études cliniques sur les bénéfices de l’art-thérapie, notamment auprès de personnes présentant des troubles de l’alimentation, de jeunes aux prises avec des problèmes de santé mentale, de patients souffrant d’arythmie cardiaque, de personnes atteintes d’Alzheimer, de femmes ayant un cancer du sein ou en rémission, de patients épileptiques ou d’immigrants. De son côté, Médecins francophones du Canada a initié une étude pour évaluer l’impact des prescriptions muséales sur les patients en partenariat avec l’équipe du projet « art et longévité » du Dr Beauchet de l’Hôpital Juif de Montréal.
Quant à Michel de la Chenelière, qui a consacré sa vie à publier des manuels pédagogiques visant à contrer le décrochage scolaire, il profite lui aussi de l’art-thérapie : « Oui, je me soigne ! Imaginez… le président du MBAM est un faussaire ! Je copie des Matisse ! Je ne sais pas dessiner, mais j’aime la couleur. Je me suis mis à peindre et je crée des trucs vraiment marrants », confie-t-il avec humour. « Je n’ai aucune formation, mais à force d’aller au musée, on développe ses goûts. C’est un apprentissage perpétuel. Moi, j’aime particulièrement les Fauvistes. Étonnant le bien que ça fait. » Croyez-en l’expérience personnelle du mécène !
À noter : en plus de l’avantage des prescriptions muséales, les médecins membres de Médecins francophones du Canada peuvent obtenir un rabais sur leur abonnement VIP au MBAM.