Les avantages industriels de l’utilisation du plastique sont répandus, et on estime que sa production devrait quadrupler d’ici 20501. Les microplastiques, qui sont omniprésents dans notre environnement avec la capacité d’y persister pendant des siècles, suscitent une inquiétude croissante quant à leur impact environnemental et à leurs effets potentiels sur la santé humaine.
Que sont les microplastiques (MP)?
Les microplastiques (MP) sont des minuscules fragments de plastique présents dans notre environnement. Le plastique ne se décompose pas comme les aliments et le papier, mais plutôt se fragmente en particules de plus en plus fines. Lorsque ces particules rétrécissent en dessous de cinq millimètres, elles deviennent ce qu’on appelle des microplastiques. Les MP plus petits qu’un micromètre sont appelés nanoplastiques.
Les MP se retrouvent partout dans notre environnement, les pneus de véhicules étant considérés comme l’une des sources les plus importantes de MP environnementaux. D’autres sources environnementales incluent les produits d’hygiène personnelle contenant des microbilles, la peinture, les eaux usées de lavage, le gazon synthétique, les sacs et bouteilles en plastique de même que les articles de pêche.
Les MP peuvent pénétrer le corps humain via trois voies d’exposition, soit l’ingestion qui est la voie principale, l’inhalation et la pénétration cutanée2.
La présence de MP dans les selles humaines confirme leur ingestion par l’alimentation. En raison de la forte concentration de MP dans l’océan, les produits de la mer (crustacés et poissons) sont considérés comme l’une des principales sources de MP par ingestion. Les autres sources alimentaires principales de MP sont l’eau en bouteille, la bière, le sel, les sachets de thé, les aliments en conserve et les plats préparés2. L’infiltration de MP via les bouteilles en plastique augmente lorsque la bouteille est exposée à la lumière directe du soleil. L’eau du robinet contient de minuscules particules de plastique, mais l’eau en bouteille en contient deux fois plus. Les boîtes de conserve en métal et les verres à café en carton contiennent un revêtement intérieur en plastique. Depuis des décennies, ce revêtement est souvent fabriqué à base de bisphénol A (BPA), une molécule qui permet d’obtenir un plastique solide et résistant. Le problème est que le BPA peut migrer dans les aliments. Le BPA est reconnu comme étant un perturbateur endocrinien, ce qui signifie qu’il peut imiter ou bloquer l’action de nos hormones naturelles et ainsi dérégler le système hormonal, même à très faibles doses. Même si de plus en plus de fabricants proposent aujourd’hui des bouteilles, emballages ou conserves avec revêtement « sans BPA », ceux-ci contiennent tout de même du plastique, parfois avec d’autres bisphénols ou résines dont les effets à long terme demeurent méconnus.
Les MP peuvent aussi pénétrer le corps humain via l’inhalation. Les textiles synthétiques et la poussière sont considérés comme les sources les plus importantes2. En effet, les vêtements et tissus faits de polyester, nylon, acrylique ou élasthanne libèrent des fibres plastiques microscopiques. Chaque fois qu’on porte, lave ou même frotte ces tissus, de minuscules fibres se détachent et restent en suspension dans l’air intérieur. Les intérieurs modernes, remplis de textiles synthétiques (tapis, rideaux, vêtements, meubles), sont donc une source continue de MP. La poussière accumule non seulement ces fibres textiles mais aussi des particules provenant de plastiques durs (meubles, peintures, emballages, jouets, revêtements de sol en vinyle, etc.).
Finalement, la peau peut aussi être une porte d’entrée pour les MP lors de l’utilisation de produits d’hygiène personnelle et cosmétiques (ex. nettoyants, exfoliants, crèmes, lotions et maquillage).
Microplastiques et effets sur la santé1
Une fois dans le corps humain, les microplastiques peuvent traverser les barrières biologiques, comme la paroi intestinale et atteindre divers organes. Les nanoplastiques, qui sont les plus petites particules, peuvent être absorbés plus facilement et distribués par la circulation sanguine. Des recherches indiquent que les MP peuvent s’accumuler dans divers organes tels que le foie, les reins et le cerveau, les organes reproducteurs et même potentiellement atteindre le placenta3,4, bien que les mécanismes exacts et les conséquences de cette accumulation restent à clarifier.
Les effets des MP sur la santé humaine sont encore largement méconnus, la plupart des études ayant été effectuées sur les animaux ou à partir de cultures cellulaires. Il a été suggéré que l’exposition aux MP peut entraîner de l’inflammation, du stress oxydatif, une altération de la fonction immunitaire, un développement et un fonctionnement anormaux des organes, des dommages cellulaires et des risques accrus de cancer1. Les MP peuvent également agir comme des vecteurs pour d’autres substances toxiques, augmentant ainsi leur potentiel nocif. Les plastiques dégradés peuvent libérer des additifs chimiques, tels que les phtalates et les bisphénols, connus pour leurs effets perturbateurs endocriniens, et contribuer ainsi à des déséquilibres hormonaux et à des troubles de fertilité.
MP et microbiote intestinal2
Des études sur des modèles animaux ont rapporté l’interaction physique des MP avec la paroi intestinale, entraînant des lésions mécaniques et potentiellement des réactions inflammatoires. Les MP peuvent augmenter la perméabilité intestinale, permettant à des particules nocives de pénétrer dans la circulation sanguine. Des études ont établi un lien entre l’exposition aux MP et la dysbiose intestinale (un déséquilibre entre les bactéries bénéfiques et pathogènes dans l’intestin). La dysbiose microbienne peut potentiellement entraîner une altération de la fonction intestinale, un affaiblissement de l’immunité et un risque accru de troubles gastro-intestinaux. De plus, les modulations induites par les MP dans le microbiote intestinal pourraient entraîner une inflammation systémique, un facteur de risque connu pour diverses maladies chroniques. Cependant, une alimentation riche en fibres et la pratique régulière d’activité physique peut aider à contrer la dysbiose intestinale induite par les MP.
MP et maladies gastrointestinales5
Une corrélation positive a été observée entre la concentration de MP fécaux et la gravité des maladies inflammatoires de l’intestin (MII). De plus, des études ont observé que les patients atteints de MII présentent une concentration plus élevée de MP dans leurs selles que les personnes en bonne santé. On observe aussi un risque accru de cancer colorectal et du pancréas chez les travailleurs de l’industrie du plastique et du caoutchouc.
MP et cerveau6
Bien que des études individuelles aient suggéré un lien entre l’exposition aux MP et l’apparition de symptômes neurologiques, les preuves concluantes restent difficiles à obtenir. Une étude récente indique que les nanoplastiques, mais aussi les MP, ont la capacité de traverser la barrière hémato-encéphalique, un filtre extrêmement sélectif qui permet de contrôler ce qui peut ou non pénétrer dans notre cerveau par le biais de la circulation sanguine. Des concentrations significativement plus élevées de MP ont été observées dans les échantillons de tissus cérébraux prélevés en 2024 que dans ceux de 2016, ainsi que dans ceux des individus atteints de démence. Cependant, les barrières hémato-encéphaliques des personnes atteintes de démence sont moins efficaces que celles des personnes en bonne santé. Ainsi, la concentration plus élevée de MP dans leur cerveau pourrait être une conséquence de la maladie, plutôt que sa cause.
MP et maladies cardiovasculaires
Des recherches récentes suggèrent une association entre les MP et un risque accru de maladies cardiovasculaires7. Dans une étude incluant 304 patients atteints de maladie cardiovasculaire, les patients présentant une plaque carotidienne (dépôt d’athérosclérose dans leur artère carotide) dans laquelle des MP ont été détectés présentaient un risque plus élevé d’infarctus du myocarde, d’accident vasculaire cérébral ou de décès après 34 mois de suivi, que ceux chez qui les particules de plastique n’ont pas été détectées8.
MP et maladies respiratoires
De plus en plus d’études montrent que l’exposition chronique aux MP peut affecter la santé respiratoire, notamment chez les personnes fortement exposées. Lorsqu’elles sont inhalées, certaines fibres et particules plastiques peuvent se déposer dans les voies respiratoires supérieures ou descendre jusqu’aux poumons. Les particules les plus fines (nanoplastiques) sont capables d’atteindre les alvéoles pulmonaires. Les personnes les plus à risque sont celles travaillant dans des environnements riches en fibres plastiques (textile, recyclage du plastique, production de matériaux synthétiques) de même que les habitants des grandes villes, exposés aux particules issues de l’usure des pneus et de la pollution atmosphérique.
Que peut-on faire pour limiter notre exposition ?
Tout d’abord, il faut savoir que la structure chimique des MP les rend sensibles à certains facteurs environnementaux, notamment la chaleur et l’acidité. Le plastique peut se décomposer ou libérer des particules fines lorsqu’il est exposé à des températures élevées. Par exemple, chauffer de l’eau dans une bouteille en plastique ou cuire un aliment dans un récipient en plastique peut provoquer le transfert de MP et de substances chimiques associées dans la nourriture ou la boisson. Les milieux acides (comme le café et certains jus de fruits, sauces ou boissons fermentées) peuvent affaiblir la structure du plastique, accélérant la fragmentation en microplastiques et la libération de composés chimiques.
Il est impossible d’éviter complètement l’exposition aux MP, mais il est possible de la limiter au quotidien. Voici huit actions pour réduire son exposition aux MP :
- Privilégier l’eau du robinet filtrée plutôt que l’eau en bouteille plastique.
- Éviter le plastique en contact avec la chaleur : ne pas chauffer de contenants en plastique au micro-ondes, ne pas verser d’eau bouillante dans des bouteilles ou gobelets en plastique, éviter les machines à café qui utilisent des capsules de plastique.
- Utiliser des contenants durables pour conserver les aliments : verre, inox ou céramique plutôt que plastique.
- Réduire les plastiques alimentaires et emballages jetables : cuisiner davantage à partir de produits frais, éviter les aliments ultra-transformés, privilégier le vrac ou les emballages en verre, métal ou carton.
- Aérer chaque jour et passer régulièrement l’aspirateur, de préférence avec un filtre HEPA, pour limiter les microplastiques présents dans la poussière.
- Choisir des cosmétiques et produits d’hygiène sans microplastiques en vérifiant la liste des ingrédients pour éviter les microbilles.
- Limiter les vêtements synthétiques (polyester, nylon, acrylique) et préférer les fibres naturelles comme le coton, le lin ou la laine.
- Laver ses vêtements à basse température, moins souvent et utiliser un sac de lavage spécial ou un filtre pour capter les fibres plastiques. Faire sécher les vêtements à l’air libre lorsque possible au lieu d’utiliser la sécheuse.
En conclusion
En conclusion, les MP représentent une menace émergente potentielle pour la santé humaine, bien que leurs effets précis nécessitent encore des recherches approfondies. La littérature actuelle ne met pas en évidence de manière concluante les effets néfastes des MP sur la santé humaine, ni ne confirme leur innocuité. Même si l’on ne peut pas éviter totalement les MP, adopter des gestes simples permet de réduire significativement son exposition, tout en encourageant des habitudes plus durables pour la santé et pour l’environnement.
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Références:
- Nurshad et al (2024) The potential impacts of micro-and-nano plastics on various organ systems in humans. The Lancet; 99.
- Bora et al. (2024) Microplastics and human health: unveiling the gut microbiome disruption and chronic disease risks. Frontiers in Cellular and Infection Microbiology; 14, 1492759.
- Zurub et al (2024) Microplastics exposure : implication for human fertility, pregnancy and child health. Frontiers in Endocrinology; 15, 1444642.
- Kumar (2025) Unseen Dangers: The Effects of Micro- and Nanoplastics on Human Reproductive Health – A Narrative Review. Recent Adv Inflamm Allergy Drug Discov; 12:127–140.
- Winiarska et al. (2024) The potential impact of nano- and microplastics on human health: Understanding human health risks. Environmental Research, 251;118535.
- Nihart et al (2025) Bioaccumulation of microplastics in decedent human brains. Nature Medicine;31:1114–19.
- Zhang et al (2025) Tiny trouble: microplastics, nanoplastics, and their heartfelt impact on cardiovascular health. Cardiovasc Res;121(7):992-1010
- Marfella et al. (2024) Microplastics and Nanoplastics in Atheromas and Cardiovascular Events. N Engl J Med; 390(10):1005–13.
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