L’impact délétère de l’automobile sur la santé publique est bien connu. À elle seule l’automobile génère plus du tiers des gaz à effet de serre (GES) dans nos villes (parfois jusqu’à 50 %). Et l’on sait que ces gaz sont la cause du réchauffement climatique actuel, le problème de santé publique le plus important auquel fait face l’humanité.
De plus, les polluants émis, COV, NOx et particules fines, contribuent à la morbidité et la mortalité cardio-vasculaire et pulmonaire : il y a une incidence plus élevée de crises d’asthme et d’hospitalisations associées à la pollution dans nos villes. Par ailleurs le transport automobile est lié à la sédentarité, à la hausse de l’obésité avec la kyrielle de problèmes associés. Il est intéressant de souligner que les utilisateurs de transport en commun marchent en moyenne 25 minutes par jour et qu’ils ont 20 à 25 % moins de surpoids. En effet, 15 à 20 minutes de marche par jour brûlent l’équivalent de 2,5 kg par année.
Selon une étude de la Santé publique de Montréal, il y a 10 fois plus de piétons et 7 fois plus de cyclistes blessés sur les artères importantes qui se trouvent en général dans des quartiers moins favorisés. Le nombre d’accidents impliquant des enfants est 5 fois plus élevé dans les quartiers plus pauvres. Au Québec les infrastructures sont souvent si mauvaises que les parents hésitent à laisser aller leurs enfants à vélo. Moins de 30 % des enfants du primaire vont à l’école à vélo de nos jours.
Les villes qui ont une présence marquée de l’automobile sont souvent perçues comme inhospitalières. On y trouve plus de béton et d’asphalte. Ce sont des villes avec des îlots de chaleur importants qui contribuent à la morbidité et à la mortalité accrues l’été. Rappelons ici la mortalité très élevée de l’été 2018 à Montréal qui illustre bien le phénomène. Mais il y a aussi le bruit et en particulier le bruit nocturne qui est associé au stress et à l’hypertension et à la détérioration de la qualité de vie. Toutes les études le démontrent : la circulation automobile intense est un frein au déplacement des gens les plus fragiles et les plus vulnérables de notre société : personnes âgées, enfants, personnes en situation de handicap. En favorisant le transport en commun et le transport actif, nous aidons les plus fragiles et les plus vulnérables dans leurs déplacements quotidiens et contribuons à réduire l’isolement social.
Le transport actif, en bref.
Les personnes qui se déplacent à pied quotidiennement sont moins obèses, ont moins de diabète, d’hypertension, de problèmes cardiovasculaires et pulmonaires. Les villes qui ont choisi le transport actif (TA) et le transport en collectif (TC) rapportent une prévalence moindre de problèmes de plusieurs cancers, de problèmes anxio-dépressifs et même de problèmes cognitifs.
Quatre grandes études de modélisation des transports (1, 2, 3, 4) réalisées sur 10 ans dans le monde ont rapporté des résultats très probants. Dans ces études, plusieurs interventions ont été recensées. On rapporte une hausse du TA et du TC, une diminution de la présence de l’autosolo, une électrification des transports, bref un « bouquet » d’interventions qui sont tout à fait réalisables. Les bénéfices sont très marqués en termes de santé publique et d’impact positif sur l’environnement. Plusieurs villes dans le monde, particulièrement en Europe, adoptent maintenant une telle approche intégrée.
Ces études sont convaincantes quant à l’importance d’un transfert modal urgent vers le TA et le TC, de même que de l’électrification des transports. Mais rappelons qu’il est fondamental d’augmenter le réseau cycliste de façon très sécuritaire. Comment faire ceci ? Certains principes sont importants :
- Aménager le territoire afin d’optimiser la connectivité
- Adopter des mesures d’apaisement de la circulation
- Avoir des mesures spécifiques pour piétons et pour cyclistes
- Diminuer la circulation de transit dans les quartiers
- Limiter la taille des camions qui traversent dans la ville
- Développer le transport collectif : accessibles, fiables et abordables
- Adopter des mesures fiscales pour favoriser le transport collectif
- Améliorer l’accès aux pôles d’emplois majeurs et aux institutions en transport actif et collectif
Ces arguments sont majeurs. Travailler sur les transports nous permet à la fois d’avoir une population plus en santé et une planète plus vivable. Et c’est la raison pour laquelle le milieu médical devrait faire la promotion du transport actif et collectif. Nous devons le faire auprès de nos patients, mais aussi auprès des pouvoirs publics, municipaux, provinciaux et fédéraux. Si le sujet vous intéresse et si vous vous demandez un peu « Par oùcommencer ? », nous vous aiderons avec plaisir.
- Woodcock J et al. Lancet 2009;374 :1930
- De Hartog JJ et al. Env Health Perspect. 2010;118(8) :1109
- Grabow ML et al. Envir Health Perspect 2012;120 :28
- Maizlish N et al. Am J Public Health 2013;103 :703