Le cerveau et la musique

Antoine Le Bars
9 juillet 2020

Capsule scientifique tirée de la conférence de Michel Rochon au Congrès annuel de médecine 2019 – Médecins francophones du Canada

Musique et cerveau, un lien millénaire ?

Avant de parler de la musique, parlons du silence. En effet, l’univers était plongé dans un silence profond avant de se former tel que nous commençons à le connaître. Puis notre planète est née dans un grand fracas de matières entrant en collision il y a de cela plusieurs milliards d’années.

Ensuite, la vie sur Terre est apparue dans l’eau, or on sait que le son se propage 4 fois plus vite dans l’eau que dans l’air. C’est donc naturellement que les premiers requins, leurs ancêtres, ont développé leur ouïe pour la chasse. Mais ce ne sont pas les seuls puisque notre ancêtre à tous, êtres humains, le Pristerodon Makayi (image ci-contre) développe la base de la structure de l’oreille interne telle que nous la connaissons, à savoir, les osselets.

Ceci dit, c’est avec homo sapiens il y a 200 000 ans qu’apparaît véritablement la musique. Le premier instrument connu est notre voix suivie de près par les percussions. Encore une fois, si nous sommes capables de créer de la musique c’est que notre cerveau nous le permet. Contrairement à la majorité des animaux qui perçoivent la musique, nous avons un cortex préfrontal (image) suffisamment développé pour cela.

Darwin vient d’ailleurs nous préciser que la musique est surtout rituelle, elle rassemble, énerve, émeu.

Crescendo en médecine

D’un rapide sondage dans la salle, Michel Rochon constate que les médecins jouent souvent d’un instrument. Pratiquer la musique est minutieux et précis, sans doute comme la médecine. Actuellement, à l’aide des appareils de mesure tels que les PETscan et la résonance magnétique fonctionnelles (IRMf), nous sommes en mesure de connaître les zones du cerveau qui entrent en éveil lorsque l’on joue ou lorsque l’on écoute de la musique. La précision est importante puisque jouer de la musique n’a pas le même impact que d’en écouter.

Ce sont les zones colorées ici en rouge (image), les aires de Brodmann, qui représentent notre cortex auditif primaire : la zone qui nous permet d’associer image et sons. Ensuite, c’est le cortex auditif secondaire qui nous permet de reconstruire la musique et le lobe frontal qui se charge de l’harmonie et du timbre. Ces zones du cerveau sont liées au système limbique, siège de la mémoire et des émotions. C’est pourquoi la musique peut provoquer des frissons musicaux.

Certains maux comme les amusies, qui sont des absences de perception de la musique, peuvent permettre de déceler des pathologies sur des zones du cerveau liées à la musique.

La musicothérapie et ses bienfaits hauts de gamme

Puisque la musique fait travailler une trentaine de zones de notre cerveau, elle peut être un bon point de départ pour aider des patients à récupérer d’un accident vasculaire cérébral (AVC).

La musique est également une bonne piste pour l’accompagnement de patients atteints d’Alzheimer. Nous avons vu que le système limbique, notamment l’hippocampe, était fortement lié à la musique et au fameux frisson musical. C’est pourquoi des stimuli musicaux ancrés dans le passé de ces patients peuvent les aider.

Comme c’est le cas pour l’art thérapie, la musicothérapie pourrait de la même façon accompagner un traitement tout en diminuant les effets secondaires.