C’est une conférence du Dr Julius Axelrod, prix Nobel de médecine en 1970 pour ses travaux sur les neurotransmetteurs les catécholamines, qui inspire André Lacroix à suivre la voie de la recherche appliquée au milieu clinique. Il était alors étudiant en première année de médecine à l’Université de Montréal.
Ses quatre ans de formation complémentaire dans des centres spécialisés en endocrinologie aux États-Unis lui permettent d’acquérir une expertise en pathologies hypophyso-surrénaliennes, en oncologie endocrinienne ainsi qu’en recherche clinique et translationnelle. Déjà à ce moment, Dr Lacroix voyait la recherche translationnelle comme une voie de pratique. « Tous mes travaux combinent le clinique et la recherche. »
Une expertise clinique pour la recherche
À son retour à Montréal, au début des années 1980, c’est à l’Hôtel-Dieu de Montréal qu’il entame sa pratique en endocrinologie. Il dirige le Laboratoire de pathophysiologie endocrinienne à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), puis au Centre de recherche du CHUM. « C’est la curiosité naturelle, la volonté de comprendre qui m’a amenée à la recherche, mentionne Dr Lacroix. J’ai choisi l’endocrinologie parce que c’est un système logique et rationnel, avec une pratique diversifiée qui touche tous les organes du corps humain. »
Dans les années 1980, André Lacroix met sur pied un centre d’expertise en pathologies hypophyso-surrénaliennes en rassemblant une équipe avec une expertise diversifiée en endocrinologie, imagerie, chirurgie, pathologie et oncologie. Il intéresse ses collègues à utiliser des approches innovantes qui font jaillir l’expertise du Québec à l’étranger.
Avec ses travaux, Dr Lacroix contribue largement aux développements de nouveaux traitements et de la prise en charge de pathologies complexes comme la maladie et le syndrome de Cushing, les tumeurs et hyperplasies surrénaliennes, le carcinome surrénalien, l’hypocorticisme et le phéochromocytome. « L’endocrinologie est une spécialité avec un rendement très élevé. On peut avoir un patient très malade et on peut l’aider à aller mieux très vite en ciblant la bonne thérapie. Il y a eu énormément de progrès en médecine, en endocrinologie dans les 30 dernières années. On n’a qu’à penser au diabète qui était une maladie grave avec des capacités de monitorer et traiter limitées auparavant », mentionne Dr Lacroix.
Des collaborations internationales déterminantes
Au fil de sa carrière, Dr Lacroix établit des collaborations avec de nombreux autres centres d’expertise à l’international, notamment en France. Pour lui, cette collaboration est la façon de faire avancer la science, d’obtenir des résultats concrets pour les patients. « Je collabore avec des gens d’un peu partout dans le monde. On met nos données ensemble. Les connaissances se bâtissent en collaboration avec d’autres. Avec les communications d’aujourd’hui, l’accessibilité du savoir et des connaissances, on développe des collaborations intéressantes plus rapidement. On constate une accélération de l’avancement des connaissances », explique Dr Lacroix.
C’est d’ailleurs grâce à ces collaborations qu’il est parvenu, avec ses proches collègues Dr Isabelle Bourdeau au CHUM et Peter Kamenicky à Paris, 30 ans après avoir observé les premières manifestations de récepteurs hormonaux ectopiques chez les patients porteurs de tumeurs et d’hyperplasies corticosurrénaliennes, à identifier le gène responsable d’hyperplasies primaires répondant à l’alimentation. Ces découvertes permettent de mieux traiter les patients atteints de ces pathologies et même d’effectuer un dépistage précoce auprès des membres de la famille.
Au-delà de la recherche, Dr Lacroix s’est aussi impliqué dans la gestion au CHUM. « J’ai toujours gardé au moins une journée clinique par semaine. » Pour lui, la gestion permet l’élaboration d’un milieu favorable, de mettre en place des orientations adéquates pour l’objectif ultime : le bien-être du patient et l’avancement des connaissances.
L’importance de la transmission des connaissances
Dr André Lacroix participe au développement de la télémédecine au Québec. « Pour moi, c’est naturel. Le télé-enseignement aide aux collaborations internationales qui font avancer la science, les connaissances. On contribue à établir des liens, mentionne Dr Lacroix. À la base, on fait de la médecine pour que le patient se sente mieux. C’est la même chose avec la recherche. La diffusion des connaissances, communiquer son savoir est satisfaisant au niveau académique, mais aussi au niveau humain », ajoute-t-il.
La télémédecine signifie également une accessibilité à une expertise pour des pays en développement. Dr Lacroix a participé au développement de plateformes d’éducation à la médecine en ligne. « Celles-ci permettent d’aider des patients dans d’autres pays qui n’auraient pas accès à l’expertise autrement. »
Dr Lacroix est un rassembleur. En 2007, sa vision d’une équipe multidisciplinaire est récompensée par la direction de la Cancérologie du Québec au ministère de la Santé et des Services sociaux. Le centre, maintenant dirigé par Dre Isabelle Bourdeau, devient le seul centre de niveau quaternaire en cancer et tumeurs surrénaliennes au Québec.
Ce centre est devenu ainsi une attraction pour de nombreux étudiants de niveaux supérieurs. « On a développé un champ d’expertise, avec un centre quaternaire en tumeurs surrénaliennes. Maintenant, nous offrons une formation spécialisée pour des collègues qui deviennent eux-mêmes des investigateurs par la suite. En accueillant des fellows de recherche de partout dans le monde, on permet aussi la diffusion de la connaissance. Ils sont brillants, motivés et participent à la collecte de données. Nous avons aussi toujours des résidents avec nous. »
La reconnaissance d’une expertise
Dr André Lacroix accueille la reconnaissance du Prix de l’œuvre scientifique avec humilité. « C’est une belle reconnaissance par les pairs pour une expertise pointue. » Si certaines connaissances s’acquièrent avec l’expérience, Dr Lacroix constate que la relève a un large champ d’expertise. Après plus de 42 ans d’une brillante carrière, Dr Lacroix n’a pas envie d’arrêter, du moins pour l’instant. Il continue un travail de recherche et d’accompagnement de patients. « Depuis 5-6 ans, je suis revenu à davantage de pratique clinique. D’ailleurs, je dois retourner sur les étages après notre entretien. »