Urgentologue et clinicien chercheur à l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal, professeur à la faculté de médecine de l’Université de Montréal, Vice-Président de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement, président du comité environnement de Médecins francophones du Canada, le Dr Éric Notebaert frôle le don d’ubiquité, habité par un seul but : sauver le milieu de vie de l’humanité. Il partage ici ses observations de cet état d’urgence. Deuxième article d’une série de trois.
L’effet de l’environnement sur la santé : l’enfer à l’urgence!
Préoccupé d’environnement et de ses conséquences sur la santé depuis le début de sa pratique, le Dr Éric Notebaert s’inquiète que les comportements vers un développement durable ne se concrétisent pas assez rapidement. Si en ce moment, des projets pour des hôpitaux verts se mettent en marche, selon lui, la réorganisation du réseau de la santé par la formation des CIUSSS a ralenti les initiatives. « Mais les choses commencent à bouger : récemment, une première réunion officielle du CIUSSS Nord de l’île a permis de rassembler tous les intervenants et de réfléchir au déploiement de plusieurs projets simultanés. »
Urgentologue à l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal, le Dr Éric Notebaert observe au quotidien les effets des changements climatiques sur la santé. « Durant la période estivale, des conditions liées aux îlots de chaleur dans les villes et des épisodes de canicule causent des maladies qu’on ne voyait pas aux urgences il y a trente ans : des coups de chaleur compensés et décompensés, avec toutes leurs complications, soit des défaillances multisystémiques menant les patients à l’insuffisance rénale, cardiaque et respiratoire. » Avec une centaine de mort rapportée, l’été dernier, selon certaines estimations, une centaine de morts rapportée (en fait le nombre précis est difficile à évaluer), ou les records de chaleur dévastateurs qu’a connu l’Europe en juin, le Dr Éric Notebaert considère que ces drames ne représentent que la pointe de l’iceberg : « Il faut contrôler les changements climatiques, c’est une véritable d’une catastrophe planétaire. »
Un immense défi de santé publique
L’an dernier, l’association américaine de santé publique a pointé du doigt les activités humaines causant le désordre climatique, dont la fracturation hydraulique dans la production d’énergies fossiles, car elles peuvent avoir des répercussions graves sur la santé. « Retard de croissance intra-utérin chez les bébés exposés, cancers, problèmes pulmonaires ou augmentation des hospitalisations pour les problèmes cardiaques… autant de raisons de santé publique qu’environnementales pour remplacer énergies polluantes par des énergies vertes : géothermie, éolien, énergie solaire ou marée-motrice », plaide le Dr Éric Notebaert. « Et il est trompeur de croire que le gaz naturel liquéfié soit une bonne solution de rechange : sur l’ensemble de son cycle de vie, il produira autant de GES que les énergies traditionnelles, en plus d’être perturbateur pour les communautés riveraines », ajoute le Vice-Président de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement.
Les changements climatiques ont un effet direct sur la santé de la population, on ne peut plus le nier. Outre l’invasion d’insectes porteurs d’infections, notamment la maladie de Lyme, des problèmes cardiaques ou respiratoires, l’effet de la pollution est de mieux en mieux étudié même en ce qui concerne le cerveau, la santé mentale et la démence. Ainsi, évoluer dans un environnement où la concentration de microparticules dans l’air est élevée augmente significativement l’incidence d’un grand nombre de pathologies.
Si de plus en plus de médecins de la relève se préoccupent des liens entre santé et environnement, le Dr Éric Notebaert a accepté la responsabilité du comité environnement de Médecins francophones du Canada dans le but d’interpeller davantage la communauté médicale. « L’Association désire sensibiliser les médecins aux questions environnementales, que ce soit au niveau du transport, de la consommation d’énergie, de l’alimentation, et même de la décroissance, un mot de plus en plus à la mode et directement lié à la pollution. En prendre conscience, s’engager et agir, auront un bénéfice sur la santé globale de nos patients et de nos sociétés. »